Ce mercredi 19 mars a eu lieu le colloque « A la recherche de thérapeutiques novatrices pour les maladies du cerveau : le cas des pathologies neurodégénératives »
Organisé à la Faculté de Pharmacie à Paris, par l’Institut thématique multi-organisme (ITMO) Neurosciences, Sciences Cognitives, Neurologie, Psychiatrie, ce colloque a été motivé par les constats suivants:
-Contraste remarquable entre l’indéniable progression des connaissances sur la physiopathologie de ces pathologies et la stagnation des approches thérapeutiques pharmacologiques, en dépit d’annonces prometteuses.
-Réduction, voire fermeture dans les grandes entreprises pharmaceutiques des départements de recherches dédiés à ces domaines.
-En regard, coût considérable de ces pathologies, dépassant le montant cumulé du coût des maladies cardio-vasculaires, diabète et cancers.
Tout d’abord, un état des lieux des maladies neurodégénératives (MND) a été dressé. Les maladies neurodégénératives présentent un problème majeur de santé publique. Dans le monde, la prévalence est de 40 millions de personnes malades d’Alzheimer, 10 millions pour la maladie de Parkinson, 250 000 personnes touchées par la SLA (Sclérose Latérale Amyotrophique) et 250 000 personnes malades d’Huntington. Toutes ces maladies neurodégénératives sont très hétérogènes d’un point de vue des symptômes (troubles de mémoire, de comportement, d’équilibre, de motricité…) car ceux-ci sont uniquement liés à l’endroit du cerveau touché par la pathologie. Ces dernières années ont permis d’identifier de nouvelles voies thérapeutiques (facteurs de risque génétiques identifiés, rôle important de la neuro-inflammation, des facteurs de risque cardiovasculaires, la notion de réserve cognitive…). Ces maladies neurodégénératives ont donc un caractère multifactoriel et nous savons maintenant qu’un seul médicament ne réussira pas à guérir chacune de ces maladies, il faudra plutôt cibler plusieurs processus biologiques.
La stratégie idéale est de mettre en place un traitement avant le début du processus pathologique, ce qui veut dire bien avant l’apparition des premiers symptômes. Mais comment identifier les personnes à risque de développer ces maladies ? Les chercheurs travaillent sur un diagnostic de plus en plus précoce, pour identifier des biomarqueurs présymptomatiques. Mais développer cette neuro-prévention pose aussi un problème éthique. En effet, est-il légitime de prédire une maladie neurodégénérative et d’annoncer à une personne qu’elle va développer la maladie d’Alzheimer alors qu’il n’existe encore aucun traitement préventif ni curatif ?
Le problème des modèles d’études précliniques a ensuite été abordé. La recherche fondamentale utilise des modèles expérimentaux simplifiés des maladies neurodégénératives. Au vu des différents échecs des traitements testés en phase clinique, les modèles expérimentaux ne s’avèrent pas très prédictifs. Mais il faut comprendre que chaque modèle expérimental doit être utilisé correctement. Pour cela, il faut tenir compte des critères de validation des modèles vis-à-vis de la pathologie (quels symptômes veut-on reproduire ? quel stade de la maladie veut-on mimer ? où la pathologie s’exprime t’elle dans le cerveau ? la mort neuronale observée est-elle d’origine sporadique ou génétique ?) et également des critères expérimentaux (faisabilité du modèle, sa reproductibilité, sa stabilité, son adéquation avec le but qu’on s’était posé). Il n’y a pas un modèle unique qui regroupe toutes les caractéristiques d’une maladie neurodégénérative, il faut plutôt utiliser plusieurs modèles.
Afin d’éviter de futurs échecs en phase clinique, il faut remettre en question l’utilisation parfois erronée des modèles animaux, le design de l’expérimentation encore trop éloigné de la réalité clinique, la croyance en une différence significative plutôt qu’en la pertinence « clinique » d’une différence, et une stratégie industrielle qui doit maintenir des projets actifs à tous les niveaux de développement du médicament.
Cependant, il y a beaucoup d’espoir quant à l’émergence de nouvelles voies de développement des médicaments. Il est maintenant établi qu’il faut vérifier précocement certains critères lorsqu’on teste un médicament, comme l’engagement de la cible (la molécule a-t’elle passé la barrière hémato-encéphalique ? où s’est-elle fixée dans le cerveau ?). La méthode des essais cliniques s’optimise : on développe les associations entre différents médicaments, afin de viser des multicibles. L’industrie pharmaceutique a beaucoup évolué, elle travaille en étroite collaboration avec la Haute Autorité de Santé, et il existe davantage d’échange entre biologistes et cliniciens.
En conclusion du colloque, il a été souligné le rôle important des associations qui financent la recherche sur les maladies neurodégénératives. Il existe un réel manque de moyens pour la recherche française, pour les jeunes chercheurs doctorants et post-doctorants qui ont du mal à trouver des financements pour continuer leur recherche en France. En proposant des salaires pour des thèses complètes et pour les jeunes scientifiques post-doctorants, LECMA-Vaincre Alzheimer apporte un soutien précieux aux futurs chercheurs de demain.
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